vendredi 30 mars 2012

Joel Stein et la littérature de la honte


Bonjour ! Je viens de réagir aujourd'hui sur facebook à propos d'un article sur Joel Stein, éditorialiste à Time Magazine (lu ici). Et j'ai bien envie de remettre ça ici pour en faire profiter tout le monde... si tant est que ça intéresse quelqu'un, bien sûr ! lol

Ah, ah, sérieux, l'essai de M. Stein (qu'on peut lire dans son intégralité ici - version anglaise seulement) me fait quand même rire !! Ce monsieur était-il réellement persuadé de ce qu'il disait ou avait-il simplement envie de faire parler de lui ? ;) Je sais, c'est à mon tour d'être provocante. J'assume. ^^

Une petite réflexion me vient quand même à l’esprit, et que nombre d’entre vous ont certainement déjà faite aussi : Joel Stein a-t-il jamais lu de la littérature jeunesse ? J’ai envie de dire non, a priori, parce que, si c’était le cas, il saurait qu’on doit se garder de telles généralités.
D’abord, pourquoi partir du principe que les publications jeunesse sont de la mauvaise littérature ? Certes, il existe de la très bonne littérature dite "classique" que n’importe quel adulte normalement cultivé devrait avoir lue (si possible), mais il y a aussi des tas de bouquins pour adultes qui sont passablement mauvais et dont le vide intellectuel et la médiocrité d’écriture n’a rien à envier à certains romans jeunesse bas de gamme, tandis qu’à l’inverse, il existe également toute une littérature jeunesse de grande qualité dans laquelle un adulte peut trouver un intérêt. Sinon, oserez-vous dire que "Le château de ma mère", de Pagnol, qu’on fait lire aux enfants en 6e est une ineptie illisible pour un adulte ? Jules Verne doit-il aussi être réservé aux enfants ? Les contes traditionnels ne sont-ils également bons que pour endormir nos chères têtes blondes ? On sait parfaitement que c’est faux et que le message véhiculé derrière est plus vaste que la vision que peut en avoir un enfant.
D’où une seconde réflexion : ce n’est pas parce qu’un livre est classé comme roman jeunesse que premièrement ce classement est exact (excusez-moi, mais à ce sujet, je ne suis pas toujours d’accord avec les classements que je trouve en librairie…) et que deuxièmement (même si sa nature correspond bien à l’étiquette qu’on lui a collée) il n’a rien à apprendre à un adulte. Les livres, les films, les bandes dessinées se comprennent à plusieurs niveaux, et un premier exemple me vient directement en tête : Astérix. Quel enfant comprend vraiment la critique (historique, puisqu’elle est le reflet de l’époque où elle a été écrite) qui est faite dans cette BD ?

Ensuite, j’ai une question essentielle à mes yeux de maman : si plus aucun adulte ne lit de romans "jeunesse", lequel d’entre eux gardera l’esprit assez jeune pour en écrire et donner le goût de lire à nos enfants ? Ils ne vont certes pas commencer à lire avec Camus ou Zola, qu’on se le dise ! Pour eux, dans un premier temps, l’important est de prendre plaisir à lire. Et ceux qui écrivent ces fameux romans jeunesse qui redonnent le goût de la lecture à nos enfants ne sont pas des gamins de dix ans, mais bien des adultes. Ces adultes-là qui écrivent des livres pour enfants sont-ils donc autant "coupables" que les adultes qui les lisent ?
D'ailleurs, de quoi sont vraiment "coupables" les adultes qui les lisent ? En tant que mère, j’estime qu’il est important de savoir ce que lisent mes enfants, et rien que pour ça, nous devrions lire de la littérature jeunesse avant de leur en confier certains volumes. Avant qu’ils ne soient capables de se forger leur opinion et le goût de la littérature de qualité, c’est à nous, parents, professeurs et autres, de leur donner des pistes. Et pour ce faire, nous devons avoir lu les livres pour savoir ce qu’ils valent… parce qu’ils n’ont pas tous la même qualité, c’est un fait. Evidemment, les gens bien pensants diront que la littérature "classique"et les grands auteurs sont là pour ça, mais quel adolescent aura vraiment envie de lire Proust ou Sartre et y prendra du plaisir ?
Enfin, se pose la question du statut de la lecture en elle-même : toutes nos lectures doivent-elles nécessairement nous apprendre quelque chose ? Est-ce que même les fameux philosophes du XVIIIe ne prenaient pas un peu de temps pour se détendre entre deux réflexions très sérieuses ? La lecture est aussi bien un loisir qu’un moyen d’apprendre et à mon sens, on peut très bien lire parfois pour apprendre et d’autres fois pour se détendre, s’évader, rêver. Dès lors, on peut très bien lire aussi des œuvres "sérieuses" (Thomas Pynchon ou un autre) et des œuvres plus "légères" qui nous permettront de nous laver le cerveau et de ne pas devenir dingue et/ou un vieux ronchon qui a perdu le goût de la vie (suivez mon regard...).

Pour finir, je voudrais revenir sur le rapport entre le porno et la littérature jeunesse. J’ai bien compris que les deux sont censés être des plaisirs coupables dont un adulte "digne de ce nom" (vive le pédantisme !) devrait avoir honte, mais voilà un raccourci bien provocateur qui me fait tout bonnement revenir à ma première question : ce monsieur était-il réellement persuadé de ce qu'il disait ou avait-il simplement envie de faire parler de lui ? ;)

Juvénilement vôtre,
Sklaerenn.

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